En 2020, une famille sur quatre est une famille monoparentale
Un chiffre en forte hausse par rapport à 2011.
Il s’agit donc d’une proportion importante de la société.
Pourtant, le sujet ne fait franchement pas le buzz dans l’actualité.
Le sujet des parents solos, c’est un peu comme “chercher une aiguille dans une botte de foin” dans le programme des candidats à la présidentielle.
Il y a bien quelques mesurettes annoncées pour “soulager” leur quotidien.
La plupart des propositions concentrent timidement le débat sur les allocations familiales et la fiscalité.
Ici et là, il est question du congé paternité et de la garde d’enfants.
Rien de bien transcendant, comparé à l’ampleur du problème.
Ne parlons même pas des pensions alimentaires :
leur calcul depuis des décennies est hermétique aux coûts réels de la vie et à l’inflation.
En réalité, il n’est jamais question d’un programme traitant du sujet de façon globale et complète.
Voici 5 raisons qui font prendre l’eau :
1. Des dépenses folles pour les essentiels
Être parent solo, avec la garde principale d’un ou plusieurs enfants, c’est être seul(e) à la barre et tout mener de front :
l’éducation des enfants, le travail et toutes les taches du quotidien.
Il n’a échappé à personne que les crises successives font fait exploser le budget des ménages.
Le poste des dépenses de santé avait déjà amorcé une hausse sans précédent depuis des années.
La crise sanitaire n’a fait que plomber davantage la situation.
Voici un petit tour des frais incompressibles assumés par le parent qui a la garde principale, dans une certaine indifférence générale :
- masques
- gels hydroalcooliques
- tests Covid
- pertes de salaires liées aux arrêts maladie
- dépenses de pharmacie non remboursées
- dépassements d’honoraires
- mutuelles…
Comme si ce n’était pas suffisant, avec pas moins de 4,5 % d’inflation en mars 2022, les budgets alimentaire, transport et logement subissent une hausse sans précédent.
Face à ce défi, nombre de parents solos sont obligés de jongler avec plusieurs métiers pour s’en sortir.
Les vacances ?
Oui, le parent solo éreinté est un doux rêveur.
Il lui arrive de penser qu’il pourrait mériter quelques vacances.
Mais le parent solo sait déjà qu’il n’en a pas les moyens.
Il sait aussi qu’il paiera sa chambre d’hôtel au tarif couple, et un supplément pour chaque enfant.
Sauf peut-être dans un gîte d’étape de haute montagne à prix cassé, dans un endroit perdu, déniché au prix de longues nuits de recherches sur internet.
Bien sûr, les enfants s’en rappelleront !
Vous savez, ces vacances tant attendues qui tournent au pugilat avec la randonnée quotidienne :
4 heures aller-retour sous les caprices de la météo pour rejoindre le premier signe de vie dans la vallée.
C’est long, très long.
Malheureusement, le remboursement de quelques séances de psychothérapie n’a que peu d’effet sur l’agonie du porte-monnaie et le moral des parents solos !
2. Des prises de risques inconsidérées
On connaissait déjà le phénomène des étudiantes qui financent leurs études par le biais de la prostitution.
Comme en témoigne l’enquête d’Alessandra d’Angelo, certaines mamans aussi, une fois les enfants couchés, s’orientent vers le cybersexe et la prostitution.
Ces expériences du désespoir ont plus de succès dans les médias que la défaillance de politique sociale qu’elles révèlent.
La colocation parentale, elle aussi, à de beaux jours devant elle.
Après la collocation des séniors, un nouveau phénomène de mode concernerait la colocation des parents…
Si le concept peut séduire avec quelques arguments accrocheurs “sur le papier”, il interroge.
Un parent solo n’est pas d’emblée candidat à la collocation.
À moins d’être un fervent convaincu, une situation de précarité peut l’y pousser.
Mais partager son intimité et celle de ses enfants relève rarement du choix délibéré ou du conte dé fées.
Et ce n’est pas sans risques.
Pourtant, les sites de mise en relation de parents en recherche de collocation fleurissent sur la toile.
Ben voyons, la misère sociale est un bon filon, n’est-ce pas ?
Nul doute que ces niches commerciales font le bonheur de ceux qui les développent.
Mais jusqu’où ira t-on dans l’exploitation de cette fragilité sociale ?
3. Des compétences dingues sous-estimées
Qui dit parent solo, dit super pouvoirs.
En effet, être parent solo, c’est prendre un aller simple pour le développement de compétences du super héro.
Des compétences dignes du meilleur des couteaux Suisse.
Le parent solo est une perle rare, car il prend tout en charge :
- l’éducation des enfants
- son travail et quelques jobs complémentaires essentiels à sa survie
- la planification “sur le fil” de tous les emplois du temps
- Les RDV médicaux, à toute heure du jour et de la nuit si nécessaire
- la recherche des solutions de garde
- la course aux bons plans pour faire baisser la facture
- la comptabilité
- la gestion des volets administratifs et scolaires
- la gestion et coordination des tâches ménagères du foyer
- la résistance psychologique quotidienne à toute épreuve (des premières crises d’opposition à l’adolescence)
- la négociation pour mettre tout le mode d’accord et garantir l’équilibre du foyer et des conditions de garde
Même malade avec 39°C de fièvre, il gère.
Car il n’a pas le choix.
Et pourtant…inégalité des salaires à charge de travail équivalente, ou discrimination à l’embauche ne sont pas si rares.
4. Un profil qui effraie
les entreprises qui bichonnent leurs parents solos salariés sont aussi rares que la neige en plein mois d’août en Provence.
Pire, être parent solo est souvent perçu comme un caillou dans la chaussure pour bon nombre d’employeurs.
Au même titre qu’une potentielle grossesse fait instantanément perdre la côte d’une candidate taillée sur-mesure pour un poste, le parent solo suscite une certaine méfiance.
Le temps partiel, les enfants malades, les retards éventuels sont autant de perspectives susceptibles de faire tiquer un employeur, lui-même parent…(mais peut-être pas solo, ou avec de vagues souvenirs de la situation).
Et pourtant, un parent solo bichonné est un professionnel surdoué d’une intelligence des situations à toute épreuve.
En effet, sa force de travail, son autonomie, ses capacités d’organisation, le sens des responsabilités et de la négociation, ou encore sa résistance au stress font de ces parents bosseurs des coéquipiers de choix dans une équipe.
D’ailleurs, l’accord d’un temps partiel conduit souvent le salarié à assumer efficacement (et en moins de temps) la même charge de travail qu’un salarié à temps plein, accessoirement bon comédien.
Le télétravail aussi est un choix “gagnant-gagnant” pour le salarié parent comme pour l’employeur.
Le télétravail est magique pour beaucoup :
- moins de trajets
- beaucoup moins de dépenses de transport
- des frais de repas maîtrisés
- moins de stress
- et la possibilité de travailler au calme depuis son nid douillet (fait rare : sans les enfants !).
Le risque de désinvestissement ou de burn-out est réel lorsque le parent solo n’est pas soulagé dans son organisation.
À l’inverse, un parent solo soutenu est une potentielle “crème de la crème” du collaborateur.
5. Une charge mentale abyssale
Les parents solos n’ont qu’à bien se tenir.
Pourquoi se plaindraient -ils ? Après tout, c’est leur choix, non ?
Certains n’hésitent pas à signaler qu’il leur appartient de mettre fin à ce statut.
Rien de plus simple, il suffirait de sauter sur le premier ou la première venue.
Sauf qu’un parent solo qui décide de le rester est une question de choix souvent mature et éclairé.
Les épreuves déjà traversées et celles enchaînées quotidiennement recentrent drastiquement les priorités.
Les blessures affectives ne permettent pas toujours d’envisager une nouvelle relation.
Maîtriser le budget, éduquer les enfants au mieux et assurer au travail occupent l’espace mental et l’emploi du temps de façon tentaculaire.
Il reste alors trop peu de place pour un zeste de légèreté.
Les espaces de liberté sont rares et pourtant, ils permettent de consolider l’équilibre personnel.
Parfois, il faut beaucoup plus de temps pour se reconstruire, condition préalable au terreau d’une future relation saine.
Sauf qu’en attendant des jours meilleurs, le parent solo est toujours seul maitre à bord…
…Avec pour obsession d’éviter un vilain remake familial du Titanic.
Retrouvez dans la suite de l’article les clés pour garder la tête hors de l’eau.
